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Jammes, Francis
Il va neiger
A Léopold Bauby
Il va neiger dans quelques jours. Je me souviens
De l’an dernier. Je me souviens de mes tristesses
Au coin du feu. Si l’on m’avait demandé: que’est-ce?
J’aurais dit: laissez-moi tranquille. Ce n’est rien.
J’ai bien réflechi, l’année avant, dans ma chambre,
Pendant que la neige lourde tombait dehors,
J’ai réfléchi pour rien. À présent comme alors je fume,
Je fume ma pipe en bois avec un bout d’ambre.
Ma vieille commode en chêne sent toujours bon.
Mais moi j’étais bête parce que tant de choses
Ne pouvaient pas changer et que c’est une pose
De vouloir chasser les choses que nous savons.
Pourquoi donc pensons-nous et parlons-nous? c’est drôle;
Nos larmes et nos baisers, eux, ne parlent pas,
Et cependant nous les comprenons, et les pas
D’un ami sont plus doux que de douces paroles.
On a baptisé les étoiles sans penser
Qu’elles n’avaient pas besoin de nom, et les nombres
Qui prouvent que les belles comètes dans l’ombre
Passeront, ne les forceront pas à passer.
Et maintenant même, où sont mes vieilles tristesses
De l’an dernier? À peine si je m’en souviens.
Je dirais: Laissez-moi tranquille, ce n’est rien,
Si dans ma chambre on venait me demander: qu’est-ce?
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L'enfant lit l'almanach
L'enfant lit l'almanach près de son panier d'oeufs.
Et, en dehors des Saints et du temps qu'il fera,
elle peut contempler les beaux signes des cieux :
Chèvre, Taureau, Bélier, Poisson, et coetera.
Ainsi, peut-elle croire, petite paysanne,
qu'au-dessus d'elle, dans les constellations,
il y a des marchés, pareils avec des ânes,
des taureaux, des béliers, des chèvres, des poissons.
C'est le marché du Ciel sans doute qu'elle lit.
Et, quand la page tourne au signe des Balances,
elle se dit qu'au Ciel comme à l'épicerie
on pèse le café, le sel, et les consciences.
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